Le storytelling : planche de salut ?

Le 2e jour des débats du Sommet des arts créatifs de Muscat a été marqué par la session sur le storytelling

Dans le cadre du Sommet mondial des arts créatifs, une conférence sur le storytelling  s’est tenue le 29 novembre au Royal Opera House de Muscat. L’idée à retenir : la machine à raconter des histoires utilise le pathos pour générer de l’empathie afin de comprendre l’autre ou de favoriser l’adhésion à une opinion. La politique l’a presque toujours utilisée pour gagner le coeur des électeurs. La musique et la télévision en raffolent de plus en plus.

La diplomatie culturelle consiste à ouvrir un dialogue entre les différentes cultures. Pour ce faire, elle se sert de l’art. Mais aussi du storytelling. En d’autres termes : l’art de raconter des histoires empreintes d’émotion. De la petite histoire racontée par la grand-mère à ses petits enfants à l’état d’urgence décrété par George Bush au lendemain des Attentats du 11 septembre 2001, la machine à raconter des histoires a fait ses preuves en matière de transmission de messages.

En 2004, George Bush a repris à son compte le storytelling pour adresser une missive aux Américains : les terroristes islamistes sont contre notre civilisation. C’est pourquoi ils ont détruit les tours jumelles de New-York. Si nous ne réagissons pas immédiatement en faisant la guerre à tous les pays du monde abritant les terroristes, vous serez en danger partout et tout le temps. Sa stratégie de campagne, si narrativement racontée, a fait mouche. Il a été réélu pour un second mandat.

Le storytelling peut, à certains égards, être vertueux. La musique et la télévision s’en servent pour atteindre le grand public. Pas seulement !

Le storytelling à la rescousse des bonobos

Les bonobos, chimpanzés nains de face foncée plutôt claire, sont en voie d’extinction. Il n’en reste plus que 50 à 60.000 dans le monde, dont la majorité vit dans les forêts équatoriales de la République démocratique du Congo entre le fleuve Congo et la rivière Kasaï. Cette espèce singulière est menacée aujourd’hui à cause de la déforestation. Le gouvernement congolais, en collaboration avec une ONG américaine, a créé une réserve naturelle à Sankuru (dans la région de Kasaï) pour préserver ces singes qui se font de plus en plus rare.

Susanna Temescu défend la cause des bonobos. « Des musiciens, comme Papa Wemba et Peter Gabriel, ont contribué à la sauvegarde de cette espèce à la République démocratique du Congo et dans le monde entier. », indique la conseillère principale du Tanager Group. Pour ce faire, l’artiste congolais a écrit une chanson soulignant l’importance de la protection des bonobos. Même son de cloche du côté de l’ex-chanteur du groupe Genesis. Dans « Animal Nation », il pousse un cri d’alarme : laissez les bonobos parler. Pour le rockeur, « l’être humain a beaucoup à apprendre des animaux » (Le Matin). Dans le clip, on le voit en train de caresser ces singes.

Le storytelling joue au football

Si le storytelling peut permettre d’alerter sur la cause des bonobos. Il nous sert aussi à mieux nous comprendre. Dans ce cas, « l’histoire racontée a pour vocation d’apaiser les conflits (entre les peuples, ndlr) en mettant en exergue un message capital : nous avons tous les mêmes aspirations et les mêmes attentes. », souligne Lisa Consiglio. La directrice exécutive de l’Aspen Writer’s Foundation finance les petites histoires enregistrées pour la radio, et filmées pour la télé. Elles tournent toutes autour du ballon rond.

Pour Lisa Consiglio , si la série « Cosby Show a influencé les mentalités des Afro-américains, pourquoi le football n’influencerait pas les mentalités des citoyens du monde ? » Sa fondation organise des tournois de football dans le monde entier pour sensibiliser les jeunes sur l’importance de s’ouvrir aux autres sociétés. Au Népal, par exemple, elle a produit une vidéo sur une femme qui voulait devenir le premier entraineur femme de son pays. Et, ce film se demandait comment ses parents allaient le prendre et si la société – dominée par les hommes –  l’accepterait.

Le projet actuel de l’Aspen Writer’s Foundation c’est de créer une équipe de football dans laquelle évoluerait les réfugiers, les immigrés et les Iraniens. La deuxième composition reprend les deux premiers avec les Libyens. Pareille pour la troisième, qui remplace les Iraniens par les Saoudiens. Le but ? Faire réfléchir ces pays sur le traitement qu’ils réservent aux réfugiers et aux immigrés.

Au vu des conflits sociaux et ethniques qui existent encore dans le monde, le storytelling a des beaux jours devant lui. Même si un jour la planète se pacifie, les politiciens continueront à user et abuser de la machine à raconter des histoires pour gagner les élections.

A propos Sebastien Badibanga

Je suis étudiant-journaliste à l'Institut Pratique du Journalisme, en apprentissage à France 2. Titulaire de la carte de presse depuis 1 an. En tant que journaliste et blogueur, j'ai été invité à assister au Sommet mondial des arts créatifs organisé par l'Institut Aspen à Muscat, du 28 au 30 novembre 2011. J'ai réalisé des reportages et interviews que je publie sur ce blog.
Cet article, publié dans ROH-Aspen Creative Arts World Summit, est tagué , , , , . Ajoutez ce permalien à vos favoris.

Laisser un commentaire